Communications > Dormoy Camille

Cette contribution repose sur une recherche ethnographique menée dans le cadre d'une thèse CIFRE en partenariat avec Amiens Métropole de 2018 à 2021. Elle examine comment le langage influence, perturbe ou entrave les processus de traitement, de valorisation et surtout de réduction des déchets. En étudiant un projet de sensibilisation intitulé « le défi zéro déchet, zéro gaspillage », cette communication explore comment le langage peut contribuer à la persistance des déchets. 

Ce projet, mis en œuvre pendant six mois avec une cinquantaine de familles, visait à former les participants à diverses pratiques de réduction des déchets. Les participants devaient ainsi apprendre les principes de la consommation responsable, de la réduction du gaspillage alimentaire, ainsi que du réemploi et du troc. Cependant, au fil du temps, ce projet s'est essentiellement centré sur une redéfinition discursive (Paveau, 2006) des termes liés à la gestion des déchets pour les aligner sur les logiques de réduction des déchets. Le terme « poubelle » a été remplacé et subdivisé en « bac de tri » et « composteur ». Le terme « déchet » a été partiellement remplacé par « recyclable » ou « compostable ». Quant au mot « jet », il a été complètement écarté. En effet, ce terme, couramment utilisé pour signifier « rejeter » ou « se débarrasser de », a été réévalué pour désigner une pratique considérée comme immorale et a été remplacé par des termes comme «recycler » ou « composter ». Ainsi, au travers du langage, les concepteurs de ce projet, tentait de promouvoir l'idée d'une « vie sans déchet » (Benelli, Corteel, Debary, Florin, Lelay, Retif, 2017) sans que ces derniers ne disparaissent réellement. 

C'est ce processus que cette communication se propose d'explorer en montrant combien l'étude de « la mise en mots du déchet » (Desoutter, 2017) permet d'observer la volonté de « faire avec » et « autrement », tout autant que la volonté de résister à ce faire « autrement' » ou un état de fait.